Le tireur de Toulouse était certes un fou dangereux et ses actes odieux au point de l’indicible, — il a tiré une petite fille par les cheveux avant de l’abattre à bout portant, juste parce qu’elle était juive, — mais il n’avait pas pris d’otage et s’était retranché seul dans son appartement.
Dès lors, pourquoi le Gouvernement a-t-il dépêché sur les lieux, pour assurer une espèce de commentaire en direct à destination de la presse, le ministre de l’Intérieur, dont ce n’était absolument pas le rôle ? Eva Joly, dont on peut penser ce qu’on veut, est quand même bien placée pour dire, à très juste titre, que ce rôle échoit à l’autorité judiciaire : au-delà de son caractère grotesque, le casting de Claude Guéant en sheriff était donc une assez scandaleuse atteinte au principe de séparation des pouvoirs.
Le RAID, ensuite. Depuis quand une unité prétendument « d’élite » met-elle trente-deux heures à venir à bout d’un homme seul et fatigué qui n’a pas pris d’otages ? Et tout cela pour qu’au bout du compte, il soit abattu alors qu’il sautait par la fenêtre (d’un entresol) ? Christian Prouteau, dont on peut, là aussi, penser ce qu’on veut, mais qui connaît aussi bien la gestion opérationnelle de ce genre de crise que Eva Joly en connaît les fondements juridiques, s’étonne qu’on n’ait pas employé des gaz lacrymogènes, qui auraient suffi à l’appréhender sans que soit nécessaire tout ce cirque.
Le président de la République, enfin. Car ledit cirque a bien sûr été mis en scène, — instrumentalisé, il n’y a guère d’autre mot possible, — pour tenter de relancer sa campagne présidentielle, soi-disant « suspendue », en réalité tout focalisée sur l’effet d’aubaine inespéré que cet homme révoltant et parfaitement dénué du moindre principe croit percevoir dans la survenance de cette tragédie.
Je n’en peux plus de compter les jours qui nous séparent encore du moment où, comme je l’espère plus que jamais, cet ignoble individu et sa cour seront boutés hors de nos palais nationaux.