Une assez vilaine controverse a surgi sur le Forum catholique, à propos d’un article, dont la teneur a été reproduite sur la La Porte latine, site du district de France de la Fraternité Saint Pie X, et dans lequel un prieur de cette structure déconseille, — dans des termes que je vous livre pour information, sans les cautionner ni les critiquer, — d’assister aux messes traditionnelles célébrées par des prêtres diocésains :
Est-ce que les prêtres qui célèbrent la messe traditionnelle, dans le cadre d’une collaboration avec les évêques et les prêtres qui propagent l’esprit du concile Vatican II, ne participent pas, même sans s’en rendre compte, à cette injure faite à Notre Seigneur ? Loin de moi de juger les dispositions de chacun, les intentions personnelles, d’en vouloir à quiconque, de manquer d’estime et de charité envers ces prêtres. Mais, objectivement, dans les faits, c’est une participation à une oeuvre qui ruine la Foi catholique. Et, conséquemment, aller à la messe de ces prêtres, c’est cautionner, soutenir aussi, à travers eux, cette oeuvre de destruction de la Foi catholique.
« Gravement schismatique », « calomnie et médisance », « discours sans intérêt » et même « Torquemada d’opérette »: le malheureux abbé de la Fraternité Saint Pie X en prend pour son grade dans le fil de discussion précité.
Ce que l’abbé semble vouloir dire, c’est sans doute qu’il vaut mieux, pour les raisons évoquées, aller à une de ses messes quand on le peut parce qu’elles sont célébrées dans un contexte dénué de toute association avec la nouvelle messe. C’est son droit, me semble-t-il, de même que d’autres, pour des raisons inverses, feront le choix inverse. Au fond, ce qui différencie les uns des autres, c’est le degré de nocivité qui s’attacherait à une association, même tenue, avec le « poison », réel ou supposé, de la nouvelle messe. On a le droit de trouver ces préventions excessives ou même inconvenantes, mais le fait de les faire siennes ne rend pas ipso facto ni calomniateur, ni médisant, ni inquisiteur sanguinaire, ni schismatique, ni même, je crois, indigne d’intérêt puisque comme un intervenant l’a remarqué sur ce fil, ces préventions ont été dans une certaine mesure partagées par Mgr Lefebvre.
Hasard ou oeuvre de la Providence ? Les Méditations pour tous les jours de l’année que je parcours chaque soir me proposent pour ce dimanche de la Sexagésime la réflexion suivante, inspirée par la parabole du Semeur dans l’évangile de ce jour :
Les Prêtres, comme envoyés de Dieu et de ses Vicaires, en ce monde, revêtus du sacerdoce et de l’autorité de Jésus-Christ, jettent diverses semences dans les âmes. Par la communion, ils y sèment Jésus, ce divin germe d’immortalité, cette semence de la vie éternelle, de toute sainteté, de toute perfection, dont il est l’auteur, le principe et la source ; par la prédication, ils y jettent la semence de la parole de Dieu, de la foi, de la vérité et de la science du salut. Les lèvres des Prêtres gardent la science (Mal. II, 7) ; c’est à eux que le trésor de la doctrine est confié. Par l’administration des sacrements, ils sèment dans les âmes la grâce et les mérites de Jésus-Christ. Ministère saint et sacré, qui doit être exercé avec zèle, crainte et humilité, mais qu’il convient de regarder toujours avec autant d’estime que de respect et de dévotion, selon ces paroles de l’Apôtre : Que les hommes nous estiment comme les ministres de Jésus-Christ et les dispensateurs des mystères de Dieu (I Cor. IV, 1). Ne touchons donc point aux oints du Seigneur ; et ne lançons jamais nos traits malins contre ses Prophètes (Ps. CIV, 15). Révérons leur caractère, couvrons leurs défauts, et tenons-nous en, par rapport à eux, à la maxime du Sauveur : Celui qui vous écoute m’écoute, et celui qui vous méprise me méprise (Lc. X, 16).
Comme j’aimerais que ces jérémiades n’aient pas lieu d’être ! Elles paraissent si dérisoires et déplacées…
On ne peut raisonnablement demander à tout le monde, au sein d’une oeuvre qui compte des centaines de prêtres et des milliers de fidèles, d’être parfait tout le temps.
Ce qui compte, c’est la valeur globale de l’apostolat de ces prêtres : que de fois il m’est arrivé d’être mécontent, — mais en privé, — d’un sermon, d’un article pondu par un abbé de la Tradition, quel que soit son label au demeurant. Mais ce qui compte à mes yeux comme, je crois, à ceux de la grande masse des fidèles, c’est que ces prêtres, sur la durée de leur sacerdoce, soient de bons prêtres, attachés à dire saintement la bonne messe, à sanctifier leurs fidèles au confessional et dans l’administration des autres sacrements: sur ce plan, jamais aucun prêtre de la Fraternité Saint Pie X ne m’a déçu. Jamais. Ni beaucoup d’autres venant d’autres communautés au demeurant. Ce sont ces qualités-là qui font leur valeur et qui les différencient des prêtres (l’immense majorité, ne l’oublions pas) qui ont, pour le plus grand malheur de l’Eglise, choisi une autre voie.